Les pays tropicaux soumis au phénomène El Nino seraient deux plus susceptibles d'entrer en conflit... Pourrait-on expliquer les conflits armés par le climat?
Selon une étude publiée 18 Août dernier, les variations climatiques, comme celles d'El Nino et La Nina, ont un impact sur le déclenchement des conflits dans les régions frappées par ces cycles naturels, un phénomène qui risque d'être aggravé par la pollution industrielle. Les pays tropicaux, victimes des tempêtes provoquées par le phénomène climatique El Nino, sont deux fois plus susceptibles d'être frappés par des conflits intérieurs que ceux touchés par le phénomène plus humide et moins chaud appelé La Nina, selon cette étude publiée dans le magazine scientifique Nature.
La famine en Somalie, doublée d'une guerre civile, qui frappe la Corne de l'Afrique est un exemple-type des effets des variations du climat dont les causes sont naturelles, provoquant sécheresse et tensions dans une société déjà fragilisée, selon les auteurs de l'étude. Ils ajoutent qu'il faudra aussi tirer les leçons des risques venant du réchauffement climatique entraîné, quant à lui, par la pollution industrielle. «L'étude montre indéniablement que même dans notre monde moderne les variations climatiques ont un impact sur la propension des gens à employer la violence», explique Mark Cane, climatologue de l'Observatoire de la Terre Lamont-Doherty auprès de la Columbia University de New York.Connu sous l'abréviation ENSO (El Nino-Southern Oscillation), El Nino, qui touche l'hémisphère Sud, est un cycle apparaissant tous les deux à sept ans et qui dure entre neuf mois et deux ans. Il inflige des pertes massives à l'agriculture, la pêche et l'exploitation forestière. Le phénomène débute par l'accumulation de masses d'eau chaude dans la partie occidentale du Pacifique tropical et traverse ensuite l'océan. Cette partie du cycle, appelée El Nino, peut susciter des modifications dramatiques dans les précipitations et les températures, déclenchant canicules, vents secs et violents en Afrique, en Asie du Sud et du Sud-Est, en Australie.
Il a été avancé que El Nino a pu jouer un rôle dans 21% des cas de guerres civiles dans le monde
Lorsque le cycle s'inverse, il s'appelle La Nina avec un rafraîchissement des masses d'eau dans la partie orientale du Pacifique, favorisant de fortes pluies dans ces régions. Les auteurs de l'étude ont examiné ces différents phénomènes climatiques observés entre 1950 et 2004 et en ont superposé les données sur les informations concernant les conflits civils internes ayant fait au moins 25 morts par an par pays sur la même période. 175 pays et 234 conflits, dont plus de la moitié ont causé plus de 1.000 morts dans des affrontements, ont été ainsi passés en revue. Pendant les périodes d'observation du phénomène La Nina, la probabilité d'éclatement d'un conflit était de 3% et elle était de 6%, soit deux fois plus, pendant les cycles d'El Nino, selon l'étude. Le risque de conflit dans les pays non touchés par ces deux phénomènes se situait à 2%.
Selon les chercheurs, El Nino a pu jouer un rôle dans 21% des cas de guerres civiles dans le monde, un chiffre qui passe à près de 30% dans les pays spécifiquement touchés par ce phénomène climatique. Solomon Hsiang, principal auteur de l'étude, a qualifié El Nino de facteur invisible car il a provoqué des pertes de récoltes, favorisé des épidémies après des ouragans dévastateurs, amplifié la famine, le chômage et les inégalités qui, à leur tour, ont alimenté dissensions et mécontentements. D'autres facteurs susceptibles d'influer sur le niveau de risque d'une guerre civile sont la croissance démographique, la prospérité et la capacité des gouvernements à gérer les évènements liés à El Nino. Selon Solomon Hsiang, la crise actuelle en Somalie, qui n'était pas incluse dans l'étude, est un «exemple parfait» des conséquences cachées d'El Nino.
source: 2011 AFP via 20minutes.fr